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L’Exil Perpétuel : L’Histoire de Khadija al-Ali et le Destin des Réfugiés Palestiniens
Khadija al-Ali n’avait que trois ans lorsque sa famille fut contrainte de fuir leur foyer pendant la guerre israélo-arabe de 1948. Comme des centaines de milliers d’autres Palestiniens, ils ont quitté leur maison avec l’espoir d’y revenir rapidement, en réponse aux appels des armées arabes qui leur avaient promis :
“Nous allons nous battre pour vous. Partez pour huit jours, et nous libérerons la terre.”
Les familles sont parties, verrouillant leurs portes et emportant les clés, convaincues que leur exil serait temporaire. Pourtant, ces huit jours se sont transformés en 77 longues années d’attente, et Khadija vit toujours dans le camp de réfugiés de Jaramana, en périphérie de Damas, en Syrie.
Le camp, qui à l’origine n’était qu’une étendue de tentes précaires, est devenu un quartier permanent fait de maisons en parpaings. Les rues étroites et boueuses résonnent des éclats de rire des enfants qui jouent sous un enchevêtrement de fils électriques. La misère et l’espoir y cohabitent, au fil des générations qui se succèdent sans perspective de retour.
Une Vie en Exil, une Leçon d’Histoire
Aujourd’hui âgée de 80 ans, Khadija al-Ali est l’une des rares habitantes du camp à être née ailleurs. La majorité des résidents n’a jamais connu d’autre maison que ces ruelles congestionnées. Pourtant, malgré les décennies qui passent, l’idée d’un retour en Palestine semble plus lointaine que jamais.
Pour Khadija, cette expérience douloureuse est un avertissement pour les Palestiniens de Gaza, qui subissent actuellement une guerre dévastatrice.
“Mon conseil aux habitants de Gaza, c’est de tenir bon. Ne partez pas, même si cela signifie devenir martyrs,” dit-elle avec une détermination implacable.
Un Avenir Incertain pour Gaza
Pendant ce temps, l’ancien président américain Donald Trump a suggéré une prise de contrôle de Gaza par les États-Unis et la relocalisation des plus de deux millions de Palestiniens qui y vivent. Sa proposition, vague et controversée, marque un revirement total de la politique américaine, qui, depuis des décennies, considère Gaza comme une partie intégrante d’un futur État palestinien, aux côtés de la Cisjordanie, avec Jérusalem-Est comme capitale.
Pour de nombreux analystes du Moyen-Orient, cette idée est totalement irréaliste. Hussein Ibish, du Gulf States Institute à Washington, est catégorique :
“C’est une illusion. Cela n’arrivera pas. Il y a trop d’obstacles, et il suffit de dire que ce projet est voué à l’échec.”
Trump n’a donné aucun détail sur des questions essentielles : qui déblayerait les ruines de Gaza ? Qui reconstruirait la région ? Qui assurerait la sécurité ? Pendant ce temps, les Palestiniens de Gaza refusent de partir, et les pays arabes rejettent catégoriquement toute idée d’accueillir des réfugiés déplacés de force.
La Guerre de 1948 : L’Origine du Drame
La guerre de 1948, qui a suivi la création d’Israël, a provoqué l’exil forcé d’environ 750 000 Palestiniens, dispersés à travers le Moyen-Orient. En décembre de la même année, l’ONU adopta la résolution 194, stipulant que les réfugiés devaient pouvoir rentrer chez eux “dès que possible”.
Mais cette promesse n’a jamais été tenue. Aujourd’hui, près de six millions de Palestiniens – les réfugiés d’origine et leurs descendants – sont enregistrés auprès de l’UNRWA, l’agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens. Beaucoup vivent dans des camps en Syrie, au Liban, en Jordanie, en Cisjordanie et à Gaza, nourrissant un profond sentiment de trahison.
Fadi Deeb, un habitant du camp de Jaramana âgé de 52 ans, exprime ce ressenti avec ferveur :
“J’ai le droit de rentrer. C’est un droit à la fois individuel et collectif. Moi, mes enfants, mon grand-père, ma grand-mère – nous avons tous le droit de rentrer.”
Israël et le Droit au Retour
Israël s’est toujours opposé au retour en masse des réfugiés palestiniens, affirmant que cela menacerait la composition démographique de l’État juif. Le gouvernement israélien accuse depuis longtemps l’UNRWA de perpétuer une dépendance intergénérationnelle, en maintenant le statut de réfugié de génération en génération.
Récemment, une nouvelle loi israélienne a interdit à l’UNRWA d’opérer sur son territoire. Si cette interdiction complique davantage la situation, l’agence continue néanmoins de fonctionner à Gaza, en Cisjordanie et dans les pays arabes voisins.
Dans ce contexte, l’idée d’un retour des réfugiés dans leurs anciens foyers situés aujourd’hui en Israël semble irréalisable. Leur seul espoir réside peut-être dans la création d’un État palestinien souverain – une perspective qui, pour l’instant, semble plus éloignée que jamais.
L’Espoir et la Résistance
Malgré tout, les réfugiés comme Fadi Deeb refusent d’abandonner l’espoir.
“Nous sommes inébranlables. Nous sommes comme des oliviers,” dit-il, citant le célèbre poète palestinien Mahmoud Darwish :
“Ma patrie n’est pas une valise, et je ne suis pas un voyageur. Je suis l’amant, et la terre est la bien-aimée.”
Pour Khadija al-Ali, la proposition de Trump ne relève pas de l’humanisme mais d’une tentative de manipulation.
“Si vous voulez vraiment aborder cette question sous un angle humanitaire, alors ramenez-les dans leurs villages d’origine,” dit-elle. “Allez reconstruire et ramenez-les, si vous vous souciez réellement de l’humanité. Mais ne trompez pas les gens avec de faux discours.”
En attendant, les habitants des camps, qu’ils soient en Syrie, à Gaza ou ailleurs, continuent de vivre entre l’exil et l’espoir, résistant à l’oubli et refusant d’abandonner leur rêve de justice et de retour.
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